vendredi 29 janvier 2016

Celui qui avait eu 3 ans et demi

Pendant qu’on regardait ailleurs, Thomas a soufflé une demi-bougie supplémentaire. 3 ans et demi pour notre petit père solide et costaud, tendre et… exigeant.



3 ans et demi tu vois, dans le monde de Thomas c’est la pré-adolescence. Parfaitement. Dans le monde de Thomas, quand on a 3 ans et demi, on est grand, on veut être le chef et on le dit. HAUT. Et FORT. Surtout FORT. On retarde au maximum l’heure du coucher, on surveille que l’Autre, la Blonde, n’ait pas un grain de riz de plus dans son assiette, et on râle sans complexe si d’aventures les choses ne se passent pas EXACTEMENT comme on l’avait espéré. On râle, on chouine, on boude. Et on serre fort ses petits poings qui aimeraient bien dire leur colère, mais pour l’instant on les maîtrise parce que ça, quand même, ça c’est vraiment interdit pour de vrai.

Pas de bol pour notre petit père plus si tranquille donc, dans le monde de Thomas les parents sont têtus. Et ils aiment bien avoir le dernier mot (surtout le papa. Si si. Moi je suis un ange de calme et de patience.). Du coup, les négociations attendries devant ce tout petit qui voudrait devenir grand ont fait place aux inflexibles « c’est comme ça et pas autrement bon sang de bois ! »
C’péniiiible, les parents... Vivement la majorité, qu’il se dit en allant bouder dans sa chambre sous le regard trop heureux de l’Autre. Majorité qui, à ce rythme, devrait être fêtée d’ici 3 ou 4 ans. Bref.


Mises à part les tensions aux heures de bain – fin de dessins-animés  – rangement de chambre – couchers en tout genre, Thomas reste Thomas, attentif et gentil. Collé-serré à l’Autre dont il envie la place d’aînée et jalouse la tablette numérique, mais incapable de résister à ses appels aux jeux, cache-cache, foot-en-salle (dans le couloir) et autre bagarres. Il a du bol, elle est gentille et patiente. En fait, la seule chose qu’il adore plus que sa sœur, c’est l’embêter. Et je dois reconnaître qu’il excelle en la matière.

Il aime toujours à la folie les trains, son circuit menace désormais d’envahir le couloir, et balance allègrement tous les playmobiles que sa sœur lui refile (« moi tu sais z’aime pas les bonhommes, ça sert pas ». Ah, d’accord.) Il a ajouté une grue télécommandée à son chantier (merci Papy Jacques et Mamyo) et ne jure que par ses moteurs diesel, essence ou électrique (et malheur à qui confond…)

Il garde son sommeil léger, léger, léger… et ne dort jamais mieux que sur l’oreiller maternel. Voir sur la tronche maternelle, les pieds dans le cou paternel, ce qui a le double avantage de tenir le rival à distance tout en gardant les petons au chaud.

Oui Thomas est un malin. Un très, très grand malin, qui m’épate, fierté personnelle, par sa maîtrise des chiffres. Il lui arrive de reprendre Diane, qui pourtant n’est pas née de la dernière pluie. Il jongle avec les chiffres, joue, s’amuse, additionne et soustraie, et réclame, c’est précis, 17 bisous le matin (« 17 c’est 1 et 7 »), et 23 le soir (« 23 c’est 2 et 3 »). Ça compense son bonhomme patate qui n’a toujours ni bras, ni jambe… Ah, et il adule le 5. Le 5 c’est son préféré, comme le bleu et le rouge. Tout comme je te dis.
Il squatte la chambre de Diane pendant ses devoirs et tend une oreille au moment de la lecture. Avec elle, il ânonne les lettres, apprends à dessiner le T, et trouve dans le mot Canard les deux A tant appréciés. (Oui parce que tu comprends, le A il est partout, chez Thomas, chez Diane, chez Maman, et chez Papa 2 fois. L’est très fort, le A.)

Thomas aime par-dessus tout les journées toussensemble, nos dimanches extra - ordinaires que l’on passe à 4. Et tous les soirs, il m’embrasse en me murmurant : « tu sais Maman c’était bien la patinoire, la fête foraine, le parc des jeux, les hamburgers, les surprises... »

Thomas, évidemment, c’est mon roi absolu. On fait un joyeux ménage à 3, lui, Œdipe et moi. Mais quand même, après chaque déclaration d’amour jusqu’aux étoiles, il me précise, gravement, que moi je suis une fille et lui un garçon. Et c’est bien connu, les garçons c’est mieux que les filles, la preuve y’a que Papa qui conduit la voiture. Alors un jour il sera grand et costaud comme Papa, mais t’inquiète pas Maman, tu pourras monter dans ma voiture rouge.
(100 ans de féminisme anéantis par ma flemmatide aigüe qui m’a empêchée de passer le permis. Là, j’ai un peu honte, quand même.)

C’est mon roi, mais je partage. Thomas trouve donc absolument normal d’être le chouchou du quartier, celui à qui les petites filles du parc filent la moitié de leur goûter et que les petits garçons poussent sur le vélo de la récré. NOR-MAL. Il trône tous les midis, seul mâle accepté à la table de l’Atsem, et celle-ci m’a dit « vous comprenez, Thomas, au fond, c’est un sensible… »
Ben voyons. Chai pas où il a pêché ce gène (en vrai j’ai ma p’tite idée), mais ça lui convient parfaitement.

Il a aussi de surprenant de très, très bien supporter de rester seul. On ne nous avait pas habitués à ça (si tu vois c’que je veux dire…). Au parc ou dans la cour de récré, il lui arrive de se la jouer solitaire et sans complexe, impassible devant les querelles de bac à sable qui faisaient s’effondrer une autre enfant de ma connaissance.

Car finalement, Thomas, pour être parfaitement comblé, n’a besoin que de ses parents, sa sœur, son doudou et ses moteurs (je ne suis pas totalement sûre de l’ordre). Ça tombe bien, parce que nous, pour être parfaitement comblés, n’avons besoin que de lui, de sa sœur, et de leurs doudous (je ne suis pas, non plus, totalement sûre de l’ordre).

Celle qui n’avait plus d’incisive

En même temps, les dents de devant, c’est très surfait. Limite inutile, tu vois. Sans elles, on avale beaucoup plus facilement sa soupe et on a le sourire le plus rigolo de la photo de classe, alors…


Portrait de famille à la mode Poudlard, madine Diane.

Diane croit encore à la petite souris. Ou à la fée des dents, elle n’a pas encore tranché, c’est selon son humeur. Mais qui que ce soit, Diane la trouve sympathique et gentiment radine. Alors, à voix haute, elle soupire et espère que, peut-être, la-petite-souris-fée-des-dents voudra bien lui donner, en échange de la dernière incisive qui l’a tant embêtée avant de tomber, un « ticket ». Comme mes copines de l’école tu vois, c’est bizarre que elles, elles ont toujours un ticket alors que moi, j’ai une pièce, hein Maman c’est bizarre ?

Ooh la bienheureuse enfant culpabilisante qui a trouvé, sous son oreiller, un billet de 5 euros…

Et voilà Diane qui thésaurise. Qui garde, compte, cache et perd ses sous. Et puis qui oublie de les amener en sortie « soldes entre filles ». Alors, elle jure MORDICUS qu’elle me remboursera les 2 euros qu’ont coûté ses barrettes et celles qu’elle offre à sa copine Éva. Sadique, je lui ai rappelé sa promesse, le matin du ticket. Mais Diane m’a calmement répondu que ce serait vraiment trop dommage de casser un si beau billet, promis elle me remboursera avec les prochains 2 euros que lui donnera la petite souris…

Diane, princesse édentée, carré court et yeux azurs, est une grande, très grande maline.


Le CP se passe. Elle épèle, tâtonne, lutte, souffle mais finalement engrange les bonnes notes. Les maths semblent avoir sa préférence, qui l’eut cru ? La maîtresse dit aussi que c’est une lectrice, et c’est vrai que les panneaux publicitaires n’ont plus aucun secret pour elle.
Des bonnes notes, mais pas que. Un jour funeste, un « C » a sanctionné sur le bulletin ses bavardages dans les rangs. Vexée et déçue, Diane a pleuré toutes les larmes de son corps et a juré de faire de très, très gros efforts, « mais tu comprends, c’est pas moi, c’est ma bouche ! ». Sur le bulletin suivant, elle a obtenu un B. Satisfaite, elle semble considérer que les très, très gros efforts ont été fructueux, elle peut s’arrêter là.

Elle a repris le théâtre, cette année, et continue son travail sur l’ar-ti-cu-la-tion. Nous constatons avec plaisir que les « re » et les « che » trouvent leur place, presque à chaque fois ! La prof affirme aussi qu’elle est de loin la plus à l’aise avec les exercices d’improvisation (tu m’étonnes…..), et qu’elle accepte désormais de perdre sans s’effondrer. Il était temps.


Elle grandit donc, la demoiselle. Mamili lui rallonge ses pulls pendant que Mamyo reprise ses pantalons (toutes les deux travaillent pour moi au black et à l’œil, oui je suis capitaliste dans l’âme). Elle grandit, et elle aussi s’en est aperçue. Elle approche des 7 ans avec l’espoir de se lever, le matin de son anniversaire, sage et transfigurée par l’âge de raison.
J’espère qu’elle ne sera pas trop déçue.

Elle a tant grandi que cette fois, ça y est c’est sûr, elle aime moins Clochette. De peur de vexer la petite fée, elle s’empresse de préciser qu’elle l’aimera toujouuuuurs, hein ! Mais maintenant, elle préfère Harry Potter. Harry Potter, le sorcier à lunettes. Ou plutôt, sa copine Hermione, la petite futée bavarde qui a toujours raison (…). D’ailleurs, elle trouve absolument désolant qu’on ne lui ait pas choisi ce prénom. Hermione, c’est tellement plus original que « Diane », et t’es SÛRE qu’on ne peut pas changer maintenant ?? Inflexibles, nous lui avons expliqué que si elle avait dû porter le nom d’un bateau, ça aurait été Mordillo, alors estime-toi heureuse cocotte (comprendra qui pourra).

Diane et moi passons donc nos soirées à Poudlard. Allongée sous sa couette, le regard perdu dans le vide et le doigt vissé dans la bouche, elle m’écoute, frissonne, s’inquiète et s’enthousiasme pour les aventures des sorciers. Le premier tome a été expédié en moins de 2 semaines, le second suit le même rythme. A 8h pétante, je ferme le bouquin, sourde aux suppliques de l’aimée (« encore un peu, encore une page, encore 3 mots, siltepléééé…. ») parce que demain le réveil sonnera tôt, et puis j’ai la bouche sèche.

A la fin du premier livre, nous lui avons organisé un samedi soir cinéma, après le coucher de Thomas. APRES LE COUCHER DE THOMAS PURÉE ! L’absence de son frère nous assurait déjà la nomination aux Oscars des meilleurs parents de l’univers. Et pour être sûrs de décrocher la statuette, on l’a laissée se glisser sur le canapé entre nous, un croc-monsieur dans une main et le saladier de pop-corn sur les genoux.
Ça a été la meilleure soirée de toute sa vie. Et c’est pas moi qui le dis, c’est elle qui l’écrit.

J.K. Rowling suit donc la Comtesse de Ségur et Marc Twain. Et là encore, je suis épatée par l’aisance avec laquelle elle s’approprie des récits complexes et se joue des subtilités narratives. Elle comprend toujours tout. Pendue à mes lèvres, m’arrêtant sur un mot inconnu, échafaudant des théories pour la suite, elle écoute et n’en perd pas une miette. J’adore la voir ainsi. J’adore et elle le sait, alors elle m’entraîne et m’emporte dans ces mondes nouveaux, et moi je la suis, mes livres à la main et le cœur amoureux de la voir si bien grandir. Je la suis, partout et toujours.

Elle grandit, lit et perd ses dents ma poulette, ma doucette, et je trouve ça fabuleux.

Mot d'amour retrouvé au fond du cartable. La séance cinéma était décidément la bonne idée du mois !

lundi 4 janvier 2016

Foie gras et chocolat


Les bas de laine au pied du sapin ont été bien garnis, les coupes ont joué leur jolie musique et la bûche n'est plus qu'un lointain souvenir (sauf pour mes fesses). Quelques jours plus tard, on piétinait les mauvais moments de 2015 sur la piste de danse et on fêtait sous les cotillons l'aube plein de promesses qui se lève avec 2016. 

Bonne année tout le monde !


Alors, bien sûr, les mauvaises langues, pâteuses de champagne mal digéré peut-être, y trouveront à redire. L'année ne peut pas être bonne. Nan madame. Elle ne peut pas être ENTIÈREMENT bonne, c'est mathématiquement impossible, on va forcément en baver. Un peu ou beaucoup, ce qui est sûr c'est qu'on va en chi... Si madame. Tout ce qu'on peut espérer, tout ce qu'on peut se souhaiter, c'est qu'un rayon de soleil perce parfois les nuages ou qu'un arc-en-ciel égaye de temps à autre le paysage brumeux. 


Et du coup, tu crois qu'à Noël, les mauvaises langues ont offert des parapluies ?


M'en fiche, moi j'embrasse et souhaite à tout va. Suis contente de ce temps qui passe et des fêtes qui reviennent. Je suis contente, alors à Noël, je pourris-gâtes mes enfants. Parfaitement. Une trottinette "Reine du froid" pour la donzelle, un camion de pompier "En avant les histoires" pour le p'tit père (tu le constateras, ce blog n'est pas subventionné). Et puis un lecteur CD pour que Diane écoute ses comédies musicales dans sa chambre très très loin de nous, et de nouvelles extensions pour le plus si petit train de Thomas.
Pourris-gâtés, je te disais.
On a aussi fait la tournée des grands ducs, 3 jours par-ci, 2 jours par-là, histoire de se faire chouchouter et profiter de tous ceux qu'on aime avec un grand M.

Non vraiment, ces fêtes de fin d'année ont été réussies. Ni les attaques de microbes armés, ni les réserves d'antibio entamées, ni les crêpages de chignons des enfants excités-énervés n'ont pu gâcher ces vacances.

Et cette année, il y avait une petite nouveauté : Diane est désormais dans la confidence. En novembre dernier, elle est revenue à la charge : "mais en vrai, le Père Noël, il existe ou c'est les parents ???" Et cette fois, à mon éternelle réponse : "l'important, c'est ce que TOI, tu en penses...", elle a reconnu, avec regret, que non, cette fois c'est sûr, elle n'y croit plus. Déjà, l'année dernière, elle avait un peu forcé le trait. Parce qu'elle est quand même bien jolie, cette histoire. Mais à 6 ans et demi, "presque 7 !", on est définitivement trop grande.
Tant pis pour la magie, elle sait bien que l'important à Noël, ce n'est pas COMMENT les cadeaux arrivent, mais COMBIEN en arrivent.

(Je rigole.)

(Quoique.)


Et voilà les vacances déjà terminées, le sapin remballé. Les enfants ont repris le chemin de l'école et moi celui du bureau. 2016 occupe maintenant toutes nos pensées, on réfléchit, planifie, imagine, espère, désespère, et on y croit quand même. Cette année promet d'être agitée, pleine de pièges et de rebondissements. Mais on n'a pas vraiment peur. Suffit qu'on reste tous les 4, et ça ira bien. Tout ira bien.


Et puis de toute façon, je te raconterai... Alors bonne année, Lecteur qui passe ici, que tes vœux se réalisent et que la joie t'accompagne, c'est quand même bien plus agréable comme ça.

Florilège & Co

Ma photo
Trentenaire, amoureuse, maman, active. Ne cuisine pas, ne coud pas, ne colorie pas. Bouquine, écrit, court après le temps tout le temps.