Pour la fête des
mères, Thomas m’a offert un miroir en cœur. Parce que je suis « la plus
belle des mamans », que j’ai la peau « tout’douce pour les
câlins », et que je sens « trop bon le matin pour aller au
travail ».
Ce petit bout
d’homme a tout compris à la vie.
Il m’arrose donc
de compliments, et parvient, sans surprise, presque toujours à ses
fins avec moi : je lui cuisine ses coquillettes au ketchup, je m’astreints
à de longues minutes de roulage de petit train, je lis 1000 fois l’histoire de
Vermillon parce que c’est sa préférée, même si en vrai je ne peux plus la voir
en peinture, cette petite souris jardinière.
Note, il n’y a
pas grand monde qui résiste à ses mots doux et têtus.
Il y en a qui
essayent, c’est vrai. Sa maîtresse le gronde parfois, mais elle assure qu’il
est tellement tendre, et gentil, et consciencieux, que c’est un crève-cœur de
devoir le punir. Diane ferme sa porte à double tour ou tente, vainement, de lui
proposer la lecture d’un manga à la place d’une course de petites voitures. Son
père fait la grosse voix à 6h du matin pour l’obliger à rester dans son lit
encore une heure, alors qu’Œdipe et moi on était déjà tout prêt à lui ouvrir
nos draps. Les Hommes de sa vie crient grâce après 15 minutes de lutte (et de
bosses et de bleus) et essaient de le tenir à distance respectable de leurs
épaules/ventres/jambes. Et puis ses copains d’école, non vraiment, ne veulent
pas de ses câlins. Ca surprend toujours un peu Thomas, qu’on n’aime pas les
câlins. C’est difficilement imaginable pour lui qui rêve d’un canapé une place
pour pouvoir regarder ses dessins-animés littéralement écrasés entre ses
parents. Mais bon, il le sait, il l’a compris, non c’est non, et il est
absolument interdit d’imposer des bisous.
Sauf à sa mère, mais sa mère c’est pas pareil, elle lui dit toujours oui.
Thomas a eu 5
ans. C’est remarquablement banal, m’enfin c’est quand même drôlement grand, 5
ans. Il a d’ailleurs bien conscience de l’importance de ce chiffre rond qui
mériterait un lit de grand. Parce que, tu comprends, s’il descend son oreiller
au milieu du matelas, ses pieds dépassent. Si ça c’est pas la preuve qu’il a
grandi…
Il avait hâte de
souffler ses bougies. Une fois avec la famille, autour de la piscine de Papy
Jacques, une fois avec les copains, et une fois à l’école.
Cette année, il
a invité 2 copains et 1 copine. Il aurait voulu plus, mais il a quand même aimé
ouvrir son univers, sa chambre, sa terrasse, son circuit de train, son
baby-foot, à ses amis. Et puis son père a pu être là. Ça tombait bien, c’est le
roi des chaises musicales.
Par contre, il
n’avait pas demandé de jouets, il nous a donc fallu improviser. Du vrombissant
bien sûr, mais aussi des jeux de société et des puzzles. Notre mécano aime
faire marcher ses méninges et continue de nous épater par son sens implacable
de la logique.
Bon, il est
toujours aussi mauvais joueur et peste comme 3 cochons lorsqu’il perd. Mais il
apprend à serrer la main, bon gré mal gré, au vainqueur, et à retenir les
larmes de frustration qui menacent de déborder.
Ce qu’il
préfère, c’est quand même de jouer contre moi, parce que je le laisse presque
toujours gagner.
Nicolas trouve
que ce n’est pas lui rendre service, et puis que ses victoires ont moins de
saveur face à moi. Mais je persiste à penser que lui montrer l’exemple d’une
défaite sereine et assumée est au moins aussi utile que lui imposer un échec.
Et toc.
De toute façon,
la vie se charge déjà de lui faire goûter aux ratés, aux imprévus, aux
pas-de-bol mais c’est comme ça. Il les affronte avec un certain stoïcisme, du
moment qu’on n’est pas loin. Ce déménagement, par exemple, ne l’inquiète pas
vraiment parce qu’il sait, c’est sûr et certain, qu’on déménage avec lui. Et
qu’un lit de grand l’attendra dans la nouvelle maison. Oui, Thomas a de la
suite dans les idées.
Et puis avant,
il y aura la case « vacances ». Il tourne les pages du calendrier
jusqu’au grand départ pour la Picardie, le jardin merveilleux de Mamaguéna et
les plages immenses de Quend. Il a vaguement compris qu’il irait sans nous mais ne
s’en formalise pas. Un mois ou presque à courir après les tracteurs entre sa
sœur et ses grands-parents, si c’est pas le bonheur ça y ressemble drôlement.
Il réclame aussi
une escapade en camping, avec si possible ses parents, beaucoup de piscines et
de toboggans. Petit Poisson n’est pas frileux et n’est jamais aussi heureux que
les pieds dans l’eau.
Thomas a eu 5
ans, donc. Et il attend déjà ses 6 ans, pour pouvoir toucher à la console de sa
sœur et inviter un copain à une soirée-pyjama. Il voudrait être grand et fort
comme un papa, et il trouve le temps bien long à passer.
Et pourtant,
pourtant, ce grand a encore beaucoup d’un tout petit.
Le pouce et le
doudou. L’odeur chaude et animale. Le besoin impérieux de câlins à toute heure
du jour (et du petit matin). Les histoires de Popi, les minis Tralalire, les
légos premier âge… Souvent je retrouve dans son profil les courbes du
nouveau-né, le petit nez rond, les joues duveteuses, l’oreille ourlée.
Et puis si on
lui demande, il dira qu’il aimerait bien retourner dans mon ventre. D’ailleurs,
souvent il glisse sa tête sous mon t-shirt et, mort de rire, il me dit :
« on dirait que tu me sens bouger, et puis on dirait que je sortirais de
ton ventre, et puis tu dirais Ooooh qu’il est mignon !, d’accord ?? »
D’accord. Je
l’ai dit, je lui dis toujours oui.
Bon anniversaire
mon Grand, mon Petit, le prince de ton papa et mon rien qu’à moi.
Ton père et moi
t’embrassons comme nous t’aimons.
photo envoyée par la maîtresse le jour de la fête des mères