Thomas, son kimono trop grand et sa ceinture blanche toute neuve, ont affronté leur premier tournoi de judo.
Diane
collectionne les médailles (en plastique), et Thomas, avec ses deux pin’s de
ski, a du mal à rivaliser. Toute l’année, il a attendu l’occasion d’agrandir sa
vitrine personnelle. Enfin, enfin, il a reçu la convocation tant attendue à son
premier tournoi de judo, jeudi 25 mai.
Son père n’a pas
pu assister à l’évènement. Alors, un peu par hasard, un peu pour compenser, mes
deux frères sont venus passer la journée avec nous et ont apporté la dose de
testostérone qui peut-être aurait manqué.
Ce jeudi matin,
nous nous sommes donc tous rendus au gymnase qui accueillait le tournoi. A
10h30, heure de la pesée, une cinquantaine de mini-judokas aux ceintures
blanches ou jaunes piaffait d’impatience derrière les portes d’entrée. Les
mâchoires de Thomas se sont serrées, mais il s’est détendu en reconnaissant
Margot, sa coach préférée, celle qu’il trouve si jolie « quand elle a son
rouge à lèvre marron ». Nice organisait la rencontre, Thomas jouait donc à
domicile face à des sportifs venus de Cannes, Toulon, et ailleurs.
J’ai installé
Diane et sa console dans les gradins avec pour consigne de ne pas bouger un
cil, et j’ai suivi Thomas jusqu’à la salle d’échauffement. Celle-ci portait
bien son nom, parce qu’au bout de deux secondes et demi, les héros du jour
étaient trempés, rouges de chaleur ou blanc d’inquiétude. Le mien relevait de
ce second camaïeu, aussi j’ai affiché mon sourire le plus calme et confiant, et
je me suis collée à une vitre basse pour qu’il puisse toujours me voir, sourde
aux protestations de mes lombaires.
Peu à peu, les
enfants étaient appelés par groupe de 5. A chaque passage d’un coach, Thomas
palissait un peu plus et mon estomac se serrait. Il aurait suffit d’un mot de
sa part, d’un tremblement de menton pour que je l’arrache de là et qu’on
s’enfuit en courant. Mais le bonhomme n’a pas la larme facile, et puis la
promesse de la médaille, une médaille pour de vrai, une médaille comme Diane,
occupait tout son esprit.
Enfin, Thomas W. était appelé. En ma qualité de maman 2012, j’ai eu le droit de suivre son petit groupe et de m’installer au bord du tatami pour assister de près au premier combat.
Et qu’il fut rude, ce combat, qu’il fut rude….
Mettons fin au
suspens immédiatement, Thomas a perdu. Le petit blondinet était trop fort. Et
peut-être un peu trop motivé par son paternel qui hurlait en russe (et dans mon
oreille droite) des conseils que je pourrais traduire par « Tue-le ! Tue-le !! » Sont
fous ces judokas…
A ma gauche,
c’était Margot qui, délaissant son rôle de juge, criait à Thomas de judicieux
conseils : « Fais des
prises ! Comme à l’entraînement, fais des prises ! ». Mon
fils, un peu surpris, un peu secoué, ouvrait de grands yeux ronds, et moi je
m’accrochais à mon téléphone-caméra comme une naufragée à sa bouée. Sont
com-plè-te-ment fous, ces judokas…
Le match a duré
une éternité, je dirai au moins 3 minutes. Thomas et moi, on a trouvé que
c’était très, très, très long, trois minutes. Aussi, quand enfin ça s’est
terminé, mon orgueilleux était si soulagé qu’il n’a même pas songé à s’émouvoir
de sa défaite.
Je l’ai, bien
sûr, chaudement félicité. Je lui ai dit qu’il avait été formidable, ce qui
n’était que la plus stricte vérité. Et Thomas… Et ben Thomas était vachement
content. Tout prêt à recommencer. Rassurée par son sourire, je suis donc
remontée dans les gradins d’où j’ai assisté à ses deux combats suivants.
Tous victorieux.
C’est comme si un blocage avait cédé, comme s’il s’était soudain détendu, souvenu du pourquoi il était là et de comment on faisait. Et que je te fais une prise Sodé, et que je t’accroche, et que je te tire, et que je te coince sous ma prise voiture, voilà, comme Margot elle dit et comme je sais si bien faire. J’avais presque envie de tirer la langue au papa russe. Presque
Il s’est
débrouillé comme un chef et a fini second de son groupe. HEU-REUX.
Je suis
redescendue en courant pour filmer la remise des médailles. Sa Margot l’a
longuement félicité, « l’assiduité et le travail a payé », elle a
dit. Mais lui n’avait dieu que pour sa récompense argentée.
Un peu plus
tard, à la plage, allongé sur une serviette de plage, la tête sur mon nombril
et la bouche pleine de pastèque, il m’a dit qu’il était bien content de sa
médaille, mais il s’est quand même assuré que ça y est, c’était fini les
combats, il allait pouvoir retrouver son « vrai judo », le judo
des jeux, dans le petit dojo du quartier, avec ses copains plus petits et plus
gentils.
« Et
l’année prochaine ? » j’ai dit.
Il a rigolé. Lui
et sa ceinture désormais blanche et jaune hésitent à essayer un nouvel art
martial. Heureusement, ils ont devant eux deux longs mois d’été pour décider.
Pyjama Cars et médaille argentée, la pointe de l'élégance selon Thomas.
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